Nathalie Bontemps
Nathalie Bontemps
Poèmes
Vendredi matin
La femme engagée, qui n’a pas l’habitude de boire, dort d’un sommeil agité. A peine a-t-elle fermé les yeux qu’elle s’est aussitôt relevée, la même, mais encore plus légère, et peut-être un soupçon plus jeune. Elle a remis en hâte le pantalon et le pull de la veille, sans se soucier qu’ils sentent la cigarette
C’est ça, la liberté que vous voulez ?
Aujourd’hui, la pancarte de Kfar Nubul dit : « Uniquement en Syrie : les chutes de martyrs dépassent les chutes de pluie ». Ce matin Asia s’est réveillée avec une impression fraîche, malgré la poussière noire de la rue, et un bourdonnement d’oreilles psychosomatique, qu’elle attribue à la dernière explosion.
Qui sait ?
Amal est toute seule à la maison en face d’une pile de papiers. A l’école où elle travaille, en bas des grands escaliers, on a demandé aux enfants d’écrire un drôle de devoir. D’écrire une lettre au président.
Familles
Pourquoi un petit enfant sort-il en plein soleil, au cœur de juillet, torse nu sur les épaules de son père, alors qu’à tout instant, du haut des toits, des snipers peuvent tirer sur la manifestation ? Se demande le médecin Khaled devant la télévision.
Cinéma
La femme engagée est assise dans le noir. Elle entend des balles claquer. Elle s’y est presque habituée. Quand l’électricité déserte le quartier, elle se dit : « très bien, le film va commencer. » Elle se détend, dans une grande salle obscure, rien que pour elle