Nous pourrions nous entendre.
Je glisse mes jambes sous la couverture, me couvre bien.
écoute.
Tu parles, bredouilles, t’endors. J’écoute.
Un chou traverse la chambre, le vendeur de vitres
hurle dans la rue,
le matou miaule brièvement, on dirait un accident de la route. J’écoute.
Tu me parles de nous, du soir
où tu t’es cassé le doigt,
de la soupe aux tripes. J’écoute.
Nous sortons nous promener, c’est ce que tu dis, tu me prends par le bras,
tu me berces dans l’air, dans les feuilles, dans l’air. J’écoute.

Cela fait un mois que je prépare mes outils.
Les meilleurs me semblent être aussi les plus lointains,
les outils en or.
Ils ont toujours été les meilleurs.
Quand j’étais petit, mon père me disait :
tes outils n’ont pas de vigueur, leur force est dans la chair,
tes outils bougent lentement chaque matin.
Prends garde à leur âge, aux traces de poussière.

Ne me touche pas, mon amour,
les pores de ma peau carnivore sont
entièrement ouverts aujourd’hui.

Le soir, le carnaval remplit ma chambre,
je n’arrête pas de me retourner dans le lit,
le froid, les jambes aussi.
Ma résistance peut être mesurée, elle est bon marché,
je calcule mes mouvements et j’inspire,
je calcule mes mouvements et j’expire.