Surdose. Fragments
« All the love I could steal, beg or borrow… »
Je suis un superbe cheval de course, les pattes arrière amputées. Quelqu’un m’étrille et des centaines de griffes métalliques s’enfoncent profondément dans ma chair,
Claudiu Komartin (1983) est l'auteur de quatre recueils de poèmes : Le manieur de marionnettes et autres insomnies (Prix national Mihai Eminescu – opera prima, 2003), Le Cirque domestique (Prix de poésie de l’Académie roumaine, 2005), Une saison à Berceni (2009) et cobalt (2013). Ses poèmes sont traduits dans une quinzaine de langues.
En tant que traducteur, il a publié en Roumanie plusieurs romans de Philippe Claudel, Tahar Ben Jelloun et J. M. G. Le Clézio.
Actuellement, Claudiu Komartin est rédacteur en chef de la revue Poesis International et de la maison d'édition Max Blecher.
Traduction et biobibliographie ©Linda Maria Baros
« All the love I could steal, beg or borrow… »
Je suis un superbe cheval de course, les pattes arrière amputées. Quelqu’un m’étrille et des centaines de griffes métalliques s’enfoncent profondément dans ma chair,
Mon royaume grandit à chaque souffrance que tu m’infliges. Mon royaume prospère à chaque repli, et, moi, j’attends sur l’un des hauts rochers contre lesquels se brisent violemment les vagues noires.
Je chanterai divinement pour toi, la bouche pleine de ta chair.
Cette nuit encore, comme toutes les autres nuits, dans ce corps bouillonne une mer de boue, sans qu’aucun récif ne s’y oppose.
J’écris.
J’écris de manière acharnée.
Sombre.
Je t’attends et laisse le soleil se tordre dans ma cornée, jusqu’à ce que mes orbites arrivent à contenir toute la viscosité de son disque.
J’écris parce que je suis une plante rampante (comme tu l’as si bien deviné le moment venu) et parce que
Je fouille en vain par-dessous la peau. Perdu dans les tourbillons de l’alcool et du soufre.
Comme dans une ruche enfumée. Je sais que tu ne m’écoutes pas, mais je prie.
En proie au désespoir. J’écris. Des rideaux de fumée par-dessus les rideaux d’amadou.